Rhapsodie américaine – Sofiane MESSABIH
pour Orchestre d’harmonie
Sofiane MESSABIH a débuté la composition de façon autodidacte puis en étudiant dans la classe de composition du CRD de Belfort, avec Paul BOISSIEUX, avec qui il obtient son Diplôme d’Études Musicales. Il y abordera librement un certain nombre d’esthétiques et techniques d’écritures, pour se les approprier ensuite dans ses compositions qui sont très variées et toutes intéressantes à leurs manières. La musique de chambre est au cœur de son écriture mais il a également écrit pour orchestre (un ciné-concert, un conte musical, un concerto pour quatuor de saxophone, deux pièces pour jeune soliste saxophoniste) et porte un intérêt certain pour les nouvelles technologies, notamment l’immersion sonore.
Il a créé trois pièces immersives avec différents procédés musicaux, technologiques et autres Origines pour quintette de flûtes traversières et récitant Toiles pour trio à cordes et système immersif (logiciel SPAT) Miroirs pour quatre voix égales de femmes. Il est lauréat du concours de composition de l’Asax 2022 avec sa pièce Le Samouraï Noir qui est sélectionnée par plusieurs concours d’interprétation nationaux et internationaux et depuis est édité chez Notes en bulles Editions.
Sofiane MESSABIH répond régulièrement à des commandes (ensemble Traverselair, Octo+si, Pôle Courbet, Ecole de musique, Conservatoires.) a composé la musique de trois documentaires diffusés sur France 3 et compose pour des groupes de jazz. Il réalise régulièrement des arrangements et compositions pour chœurs.
Il est également titulaire d’un prix de perfectionnement en saxophone, d’un Diplôme d’Études Musicales en jazz et d’un Diplôme d’ État en direction d’ensembles vocaux. Sofiane a également remporté le prix public jeune du concours « Musique en courts » 2014.
1) Coup de projecteur sur le Concours de composition de Belfort
La Rhapsodie américaine de Sofiane MESSABIH a remporté le 1er prix du concours international de composition pour orchestre d’harmonie de Belfort (Territoire de Belfort en Franche-Comté). Dès sa première édition en 2019, le concours international de composition pour orchestre d’harmonie, initié et proposé par la Ville de Belfort, s’est illustré par son succès auprès du public et par le nombre d’inscriptions.
Démarrée en pleine pandémie en septembre 2021, la seconde édition a affiché un succès renouvelé. Le Concours a pour objectif d’enrichir le répertoire des musiques originales pour Orchestre d’Harmonie et ensemble de musiques actuelles. Toutes les esthétiques et toutes les formes musicales sont admises. Douze minutes, c’est le calibre donné à chaque œuvre selon un cahier des charges très complet.
Le concours a reçu 106 participations (dont 9 femmes seulement) provenant de 35 pays. En juin 2022, le jury se réunit une première fois pour effectuer la présélection, à partir des partitions, en « entendant intérieurement » chaque œuvre à la table. Le jury était présidé par l’Allemande Annette SCHLÜNZ, compositrice et professeure de composition, la Française Céline PELLMONT, flûtiste et cheffe d’orchestre, le Portugais Lino GUERRERIO, compositeur et professeur de composition, et le Français Philippe BARTHOLD, directeur du conservatoire de Bourges.
La finale des 3 et 4 décembre 2022 a reflété la diversité des origines géographiques et des écoles d’écriture avec la qualification d’un Argentin, d’un Finlandais, d’un Italien et de trois Français (dont une femme). Les compositeurs sélectionnés et les quatre membres du jury ont entendu pour la première fois le rendu musical de leurs compositions à l’occasion de la finale.
Les 65 musiciens de l’Orchestre d’harmonie de la Ville de Belfort (OHVB), rejoints par les cinq musiciens professionnels du groupe de musique actuelle, ont répété depuis le mois de juin les six pièces en finale. Sur la scène de la Maison du peuple, l’OHVB, dirigé par Xavier SCHEID, également organisateur de l’événement, a interprété chacun des six morceaux d’une dizaine de minutes environ.
C’est le régional de l’étape, Sofiane MESSABIH, compositeur, chef de chœur et saxophoniste de Besançon, qui a été élu à la première place avec sa Rhapsodie Américaine pour orchestre d’harmonie avec trompette, saxophone ténor, guitare électrique, guitare basse et batterie. Il a gagné un chèque de 4 000 €. Le second est l’Italien Federico AGNELLO, compositeur, chef de chœur et professeur de percussions à Trento qui remporte 2 000 € pour Perpetuum pour orchestre d’harmonie avec guitare électrique et guitare basse. Le troisième prix revient à l’Argentin Nicolas POSTERNAK, compositeur, arrangeur, pianiste et bassiste, professeur au conservatoire de Buenos Aires. Sa composition Sosteniendo el sol pour orchestre d’harmonie, accordéon, guitare acoustique, guitare basse et batterie, lui rapporte 1 000 €.
Nouveauté pour cette seconde édition, le public, lui aussi, a pu voter pour son œuvre préférée. Il a choisi le Français Romain LHOSTE, compositeur et claviériste et ingénieur dans l’aéronautique. Sa composition La dichotomie d’une nouvelle ère pour orchestre d’harmonie, deux guitares électriques, guitare basse et batterie, lui permet d’obtenir le prix du public d’un montant de 1 000 €.
Le Concours de composition de Belfort vivra sa 3e édition en 2024-2025.
Focus présenté par Xavier SCHEID, chef de l’Orchestre d’Harmonie de la Ville de Belfort, président de la Fédération Musicale de Franche-Comté (CMF Franche-Comté)
2) Quelques mots pour décrire les temps forts et l’esprit de l’œuvre
La pièce s’ouvre par une fanfare (cuivres et percussions) incertaine et hésitante qui s’interrompt et ne trouve son élan qu’à la 4e reprise. Elle est introductive d’une marche modulant sur des arpèges des bois pour aboutir dans un éclat puissant de l’orchestre en fanfare.
Cette introduction n’est en fait qu’une invitation faite à l’orchestre pour entendre les harmoniques répétitives de la guitare électrique (1’45’’), sorte de fréquence radio sur laquelle se lissent des accords bitonaux des bois et des descentes de basse. La trompette et le saxophone ténor de l’ensemble de musique actuelle (à 2’40’’) introduisent le premier thème jazz de cette rhapsodie (2’55’’). Un son riche, soutenu par la basse électrique, est porté par une écriture thématique pleine de fraîcheur avec des soli proches du free jazz voire d’une inspiration « pinkfloydienne » ou mieux encore, un hommage à Franck ZAPPA (1940-1993) avec solo de guitare électrique légèrement saturée et ruptures permanentes. Le groove tourne avant de s’apaiser (5’20’’) dans des brumes océaniques.
Le second thème (lento) de la rhapsodie prend des aspects qui ne sont pas sans rappeler Léonard BERNSTEIN et quelque air de West Side Story bien qu’il n’y ait aucun plagia mais plutôt un hommage. Ce ne sont pas les notes mais l’esprit des Sharks et des Jets qui se fait entendre ici.
Le troisième thème (à 6’30’’) débouche brutalement sur le boulevards de Beverly Hills. Il semble plus proche de la soul et du rhythm and blues (RnB) à la mode séduisant des grandes années de la Motown des années 1960-1970, tout en citant brièvement un America bernsteinien. À moins qu’il s’agisse d’une citation clin d’œil au Mais non, mais non d’Henri SALVADOR ? Quoi qu’il en soit, les dysharmonies savantes donnent tout son sens à cette musique proche du free et le saxophone ténor nous entraîne dans le caveau sombre d’un club de jazz le temps de se familiariser avec cet univers et ses rythmes balancés.
Le quatrième thème, annoncé au piano, s’apparente plus à une musique populaire de plein air, entre cirque et parade. La batterie perturbe le tout (à 11’37’’) rappelant à la fois les thèmes 3 et 2 et se terminant dans l’écriture d’un final cinématographique triomphal. L’esprit de John Williams n’est pas loin.
Sans doute l’auditeur peut-il être déstabilisé par la diversité des thèmes, voire leurs juxtapositions étranges puisque relevant d’esthétiques différentes. Mais Sofiane MESSABIH nous rappelle qu’une rhapsodie reste une pièce instrumentale de forme libre dans laquelle sont juxtaposés, plus que combinés ou développés, des thèmes généralement empruntés à une musique nationale ou régionale. N’oublions pas que la Rhapsodie présentée ici est américaine et qu’elle est parfaitement adaptée pour contribuer à la rénovation des répertoires des orchestres d’harmonie et qu’elle saura enchanter un public qui doit se renouveler, lui aussi.
Présentation par Patrick PÉRONNET, docteur en musicologie
Résumé du 2e Concours International de Composition de Belfort 2022.
Création :
Dans le cadre de la finale du 2e concours international de composition, le 4 décembre 2022 à Belfort (90).
Interprété par l’Orchestre d’Harmonie de la Ville de Belfort et le groupe de musiques actuelles composé de Julien Lhuillier- saxophone ténor, Jean-Claude André- trompette, Eric Santato- guitare électrique, Christian Lassauge – basse et Pierre Labreuche – batterie.
Direction : Xavier Scheid
Partition :
Titre : Rhapsodie américaine
Pour : Orchestre d’harmonie
Durée : 13’20”
Niveau : Medium
Editeur : À paraître chez Note en bulle éditions, 6 Rue de Rennes, 29200 Brest – France (contact@noteenbulle-editions.com)
La photographie de la remise des prix le 4 décembre 2022. De gauche à droite : Philippe BARTHOLD, Annette SCHLÜNZ, Sofiane MESSABIH (1er prix), Nicolas POSTERNAK (3e prix), Romain LHOSTE (prix du public), Céline PELLMONT et Lino GUERREIRO. Le 2e prix, Frederico AGNELLO n’a pu être présent à Belfort. Photo Est Républicain /Christine DUMAS.